Après un premier jet fort réussi avec Kingsman : Services Secrets, Matthew Vaughn remet le couvert dans un Kingsman : Le Cercle d’Or plus spectaculaire encore que son aîné. Un travail sur la forme qui a négligé le fond…
Kingsman : Le Cercle d’Or, une suite nécessaire ?
Intrigué par le premier Kingsman, je l’ai regardé assez tard, probablement rebuté par l’excès de pub sur mon navigateur web. Et j’ai beaucoup aimé… Enfin, à l’exception de cette fin supposément provocatrice et d’un sexisme aussi lourd que gratuit. Le trailer de Kingsman : Le Cercle d’Or ne m’a pas plus convaincu mais suite à ma première expérience, je suis tout de même allé à la projection de cette suite. Après avoir été légèrement déçu par Baby Driver, je pense qu’on tient enfin le film d’action de l’année. Mais seulement d’action car si Kingsman : Le Cercle d’Or se montre aussi divertissant que spectaculaire, il s’avère plutôt maigre dès qu’on gratte la surface, tout en reproduisant quelques défauts du premier film.
Arrêtez de parler et tapez-vous dessus, merde !
Commençons par ce qui fait tache, l’absence de travail sur les personnages. Le film s’en absout complètement et passe à l’action après même pas 30 secondes… Pas de quête initiatique comme dans le premier – c’est logique – mais rien non plus pour la remplacer. Les interactions oscillent entre le summum du kitsch et une pseudo-profondeur peu crédible. Merlin (incarné par un Mark Strong correct) passe ainsi au second plan, laissant derrière lui une Halle Berry – son équivalent américain – complètement transparente. Channing Tatum, qui avait l’air d’un beauf sudiste des États-Unis s’avère plus intéressant mais disparaît les 3/4 du film. Et que dire de la relation entre le héros Eggsy (Taron Egerton) et Princesse Tilde (Hanna Alström), qui commençait bien avec deux adultes matures et responsables, pour se transformer en teenage movie avec une fin grotesque.
On reprochera aussi au script sa gratuité. Certes, Kingsman : Le Cercle d’Or se présente en pastiche des classiques d’espionnage mais la grande force du film réside dans son équilibre entre extravagance et second degré. Ici, l’élégance de l’écriture cède trop souvent au vulgaire le plus gras. Pire, certaines scènes sanglantes semblent atténuées. Comme le mec plongé dans un hachoir électrique sans la moindre goutte de sang, ou cet autre gars arraché en deux mais vu de loin via un reflet. Par contre, la main qu’on voit lentement en gros plan s’insinuer dans une culotte féminine, pas de problème ! (Oui car Kingsman : Le Cercle d’Or n’est pas un film pour enfants…) Et avant qu’on me sorte le “mais c’est volontairement provocateur”, non, navré, c’est purement gratuit. Provoquer pour provoquer n’a pas de sens. Reste le propos politique du film sur la drogue, si mal amené que les gens zapperont.
Un Anglais et un Américain en costards vont dans un bar…
Ces choix scénaristiques sont d’autant plus frustrants que l’écriture se paie quelques excellentes idées. Notamment le fait de réunir les agents secrets britanniques Kingsman avec leurs homologues US de Statesman. Histoire d’alimenter le cliché, ces derniers distillent de l’alcool en guise de couverture et leurs membres portent tous un nom alcoolisé. Si l’on voit peu Tequila (Tatum) et Champagne (un Jeff Bridges fidèle à lui-même avec le plus bel accent), c’est Whiskey (Pedro Pascal) qui mène la danse. Et si les personnages sont relativement peu construits, les acteurs les incarnent avec brio. Je ne retiens aucune prestation ratée, sauf peut-être celles d’Alström et de Berry mais l’écriture n’aide vraiment pas. De même, certains trouveront Julianne Moore trop caricaturale dans le rôle de la méchante (et n’est pas Samuel L. Jackson qui veut).
Les personnages réduits et la vulgarité gratuite se voient également compensées par un humour plutôt réussi. Dans l’ensemble, les vannes sont bien écrites et bien placées, les jeux de mots ingénieux. On retrouve cet équilibre fragile entre excentricité et subtilité, avec des blagues lourdes et d’autres si fines qu’il faut quelques secondes pour les saisir. On sent en tout cas que les scénaristes ont pris du plaisir à concevoir leur plaisanteries et ça, c’est toujours contagieux. La palme revient à Elton John qui joue son propre rôle (au début, je croyais même que c’était un sosie tellement le rôle était décalé) et à Bruce Greenwood, dont le rôle de président américain ajoute au ton politique au film (et je n’en dis pas plus…).
I see dead people… it’s awesome!
Quitte à réaliser un film qui est sa propre parodie, autant sortir le grand jeu, n’est-ce pas ? Et c’est là que Kingsman : Le Cercle d’Or brille de mille feux. Dès les premières minutes, le film impose son rythme et sa maîtrise des effets spéciaux ainsi que de la caméra. En dehors de quelques images de synthèse pas très discrètes, le film gère très bien le mélange entre action physique brutale et pirouettes numériques pour des plans-séquences qui rendent presque dérisoire la scène de l’église du premier épisode.
Des combats, des courses-poursuites, des explosions, le tout à coups de gadgets déjantés et de vannes improbables. Kingsman : Le Cercle d’Or jouit d’une réalisation soignée qui divertit tant le spectateur qu’il ne sent pas les 2h20 passer. On serait presque tenté de lui pardonner ses choix scénaristiques, d’autant que le film se permet quelques clins d’oeil à la mise en scène du volet précédent, sans tomber dans la référence facile.
Le MTV award du film d’action ?
Kingsman : Services Secrets avait ce petit côté sympathique et familier (malgré sa… “provocation”) qu’on retrouve moins dans Kingsman : Le Cercle d’Or. Cette suite tombe le masque et assume son rôle parodique. Certes, on retrouve ce subtil mélange de flegme britannique et de vulgarité grasse mais l’écriture perd un peu de sa saveur. On nage donc entre le grossier et le subversif. Les personnages sont peu mis en valeur, tandis que le ton politique subtil du film risque de passer à la trappe chez pas mal de spectateurs. Le film peut toutefois compter sur un casting brillant, qui nous livre un film d’action drôle, habilement mis en scène et savamment réalisé. Les nombreuses scènes d’action explosent l’écran et on passe un moment très divertissant.
Et si vous vous êtes laissés tenter par les aventures d’Eggsy, n’hésitez pas à faire part de votre avis en commentaire !
À bientôt sur Sitegeek.fr,
Musa
Bande-annonce