Avec son open-world dans le montana rural et sa secte extrémiste qui crée son système autarcique, Far Cry 5 avait tout pour plaire. Et pourtant, le jeu arrive à se vautrer. “WTF ?!” comme diraient nos amis outre-Atlantique.
Un après-midi avec Far Cry 5 sur Xbox One
Peu friand de FPS, je n’ai côtoyé que les ténors du genre. BioShock, Dishonored ou encore Far Cry 3, indiscutablement le meilleur volet de la série, qui lui a donné un second souffle. En s’inspirant de mécanismes ayant plus ou moins fait leurs preuves dans ses autres licences, Ubisoft avait conçu un titre engageant et immersif, avec l’un des antagonistes les plus emblématiques du jeu vidéo. Si bien que l’éditeur s’est précipité d’accoucher de deux autres volets, moins réussis mais toujours aussi efficaces. En se donnant plus de temps avec Far Cry 5, on pouvait vraiment s’attendre à un second coup de boost, avec une pléthore de nouveautés et surtout un cadre au moins aussi mémorable que dans le 3. Au lieu de ça, on se retrouve avec un Far Cry 3.5 qui n’arrive même pas à la cheville de son aïeul. “Triste”, comme dirait un président dont on ne prononcera pas le nom dans ce test.
C’est grand, c’est beau, c’est vivant…
Ce qu’on ne reprochera à Far Cry 5, c’est sa prestance technique et esthétique. Damn, que c’est beau ! Parvenir, dans un open-world de cette envergure, à produire des effets de lumière évoquant de manière si criante le sud des États-Unis… chapeau ! Les textures de la pierre qui reflète le soleil, la granularité du bois, les vibrations lors des mouvements, la texture et les animations des visages relèvent d’une maîtrise technique impressionnante. Surtout pour un moteur graphique qui date. Les animations restent dans l’ensemble moins convaincantes, recyclées en partie des volets précédents. Le son contribue à l’immersion indéniable procurée par Far Cry 5, notamment dans les effets produits par certains véhicules (je pense en particulier aux engins volants). Le jeu d’Ubisoft transpire le souci du détail et on ne peut que saluer le développeur de s’être donné les moyens de réaliser un beau jeu.
Open-world oblige, cet investissement a un prix. J’ai testé le jeu sur Xbox One et les flammes, bien qu’organiques, se paient des étincelles en pixels peu sexy. D’autres textures (la végétation, notamment) se montrent figées et enfin, les ennemis ainsi que certains lieux clés ont été tout simplement clonés et dispatchés sur la map. Quant à la musique, elle nous transporte dans le Montana dès les premières notes du thème principal. Le reste de la BO, bien que dans l’ambiance, se révèle plus timide et n’offre aucun moment mémorable. Le studio s’est bien plus concentré sur le doublage, d’excellente facture (surtout en VO), même si pour une raison inconnue, j’ai souvent eu droit à des phrases commencées en anglais et terminées en français. Et puis qu’on parle de bugs, je n’en ai pas croisé tant que ça, finalement, même si certains étaient tout simplement majestueux (genre la voiture qui saute).
… mais on est obligé de s’ennuyer !
Une fois la bonne surprise graphique passée et une introduction catchy, on s’ennuie vite. Sous l’immense et joli vernis de Far Cry 5 se cache un vide vertigineux. Le jeu est beau, vivant et regorge d’éléments aléatoires mais la répétition s’installe très vite, tandis que les missions s’avèrent très fades. Ce sont les mêmes camions, pick-ups, mêmes ennemis, avant-postes… bref, les mêmes, toujours les mêmes, qu’il faut tuer, détruire, etc. *Soupir* En quelques heures, je saturais déjà et je me suis fait douleur pour poursuivre l’aventure. Et il faut s’en donner le temps car les développeurs ne se sont pas contentés de rendre le jeu répétitif. Ils vous obligent à jouer toujours plus en gonflant leur jeu de manière superficielle. Il faut en effet remplir la jauge des trois régions via une flopée de missions de va-tue/détruis-reviens avant de pouvoir enfin défier les boss.
Cette monotonie se voit entrecoupée de séquences intéressantes mettant en scène les boss en question qui vous kidnappent ou vous menacent, ce qui permet de reprendre son souffle face à la lassitude étouffante qu’inflige Far Cry 5 par ailleurs. Mais en fin de compte, la (pas si) petite bourgade de Hope County s’est révélée bien triste, malgré ses décors splendides et variés ainsi que ses antagonistes hauts en couleur. Et comme si toujours faire la même chose ne suffisait pas, on tombe régulièrement sur des ennemis clonés disséminés sur la carte pour ralentir davantage notre progression avec des gunfights fainéantes et peu inspirées. Je garde quand même un bon souvenir des missions en avions, offrant une sensation grisante de liberté, contrairement aux véhicules terrestres horribles à piloter (et auxquels on privilégie assez vite le voyage rapide, Dieu merci).
C’est quoi, cet anti-trumpisme primaire ?!
Bon, on ne va pas chercher le salut dans le gameplay répétitif du jeu mais le scénario présageait quelque chose de bon, non ? Alors oui, dans une Amérique du Nord en proie aux gamineries d’un président qui fait de la politique sur Twitter, choisir le Montana comme cadre n’est pas anodin. Le directeur créatif du jeu l’a lui-même reconnu. On notera d’ailleurs sur les réseaux sociaux moult accusations à l’égard de Far Cry 5. Un jeu trop politique, qui critiquerait ce qu’on appelle l’alt-right (vous savez, ce mot soft pour parler des suprématistes blancs…). Deux choses : non seulement ce constat est biaisé puisque la secte d’Eden’s Gate dans le jeu compte des personnages racisés, mais en plus je ne me souviens pas avoir vu de tollé quand les extrémistes des épisodes précédents étaient “exotiques” (terme cynique pour évoquer les “non-blancs”, bien évidemment).
Quoi qu’il en soit, revenons-en, au contexte du jeu. Il s’avère très intéressant de prime abord. S’attaquer à une secte qui vit en autarcie et fait sa loi en plein milieu des États-Unis a quelque chose de très intriguant. Le climat paradisiaque des autres épisodes cède la place à un cadre plus maussade. On se croirait errer dans un épisode de The Walking Dead. Et l’intro, comme je le mentionnais plus haut, promet une histoire prenante. Dommage, le gameplay à rallonge (à cause de ces maudites jauges à remplir) rend la progression si fastidieuse que l’intérêt de l’histoire se perd. De même, les antagonistes excentriques sont bien moins inspirés qu’un Vaas ou même un Pagan Min. Quant aux PNJ qu’on rencontre, malgré la bonne volonté manifeste des scénaristes, on a sincèrement du mal à s’y attacher tant ils paraissent caricaturaux à leur manière.
My hero generator
Pour couronner le tout, on se retrouve avec un personnage principal qui a le charisme d’une moule (c’est pas très charismatique, une moule !). Comment par exemple pardonner le mutisme de son héros en 2018 ? Dans un jeu triple A ? Alors que les épisodes précédents avaient un héros vocal ? Certes, on peut incarner un homme ou une femme mais quel intérêt à partir du moment où n’en ressent absolument pas les effets ? Et ne comptez pas sur l’éditeur de personnage, qui fait plutôt office de cache-misère, pour changer la donne.
Restent quelques éléments de jeu qui tournent assez bien, comme la progression façon RPG avec des points à dépenser pour débloquer matériel ou compétences. Ou encore la possibilité d’avoir des alliés en jeu, parmi lesquels des “experts” dans leurs domaines respectifs (y a même un chien et il est trop cool !). Mais on patauge malgré tout dans des mécaniques de jeu très classiques.
Résumé des scores
Graphismes
Jouabilité
Bande son
Scénario
Durée de vie
Si creux
Une map énorme, riche et vivante pour se vautrer dans l'ennui le plus affligeant. Ce n'est certainement pas ce qu'on attendait de ce Far Cry 5 au demeurant bien réalisé.
Revue de presse
5/10Gamekult |
18/20Gamergen |
16/20JV.com |
8/10Gameblog |
60 balles pour le skin de Far Cry 3
En jouant à Far Cry 5, je suis arrivé à un stade où je serrais des dents chaque fois que je prenais la manette. Un sentiment subjectif, que tout le monde ne partagera pas. Un sentiment qui s’explique toutefois par des éléments plus ou moins objectifs, comme la répétitivité du gameplay. Ou encore son immense aire de jeu aussi magnifique que peu engageante. Sans compter des problèmes de gameplay comme une conduite à deux balles, une obligation de remplir des missions annexes ennuyeuses ou encore un cadre prometteur mais mal exploité. Moi qui avais adoré Far Cry 3, je me retrouve face à une pâle copie, si bien que j’invite les non-initiés à jouer à la version de 2012 plutôt qu’à celle-ci. En revanche, si la réalisation magnifique du jeu vous suffit et si les défauts que je cite ne vous refroidissent pas, vous passerez un bon moment dans Far Cry 5 parmi les gens très charmants de Hope County.
Plus d’infos sur le site officiel de Far Cry 5.
À très bientôt sur Sitegeek,
Musa
Un jeu immensément creux
Bande-annonce :
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