La licence Matrix fait partie de ces chefs-d’œuvre du 7e art qui n’avaient pas (encore) eu droit à un quelconque reboot, revival ou autre prequel. Avec ce 4ᵉ épisode Matrix Resurrections, c’est maintenant chose faite. Alors, coup de génie ou coup de marketing ?
Matrix – Les bases du phénomène
Matrix 4 vient donc de sortir ce 22 décembre 2021. Il fait suite à l’une des plus grandes tétralogies de l’histoire du cinéma. Le premier épisode Matrix, a définitivement marqué son époque, avec en 1999, un budget dérisoire au vu du phénomène. La trilogie, et son premier opus en question, ont brillé autour de 3 qualités exceptionnelles : Le Bullet Time Effect, les ralentis de fou et le scénario autour de la Matrice, fouillé et amplificateur philosophique des bases posées par Terminator de James Cameron de 1984. Entendez par là, la domination des machines sur l’humanité.
Matrix 4 – Le pitch
Pour faire simple sans vous spoiler, Matrix 4 ouvre le rideau quelques années après la conclusion épique et martiale de Matrix 3. De nouveaux personnages semblent toujours jouer au chat et à la souris entre la vérité de la Matrice et l’illusion du monde réel tel que nous le percevons. Rapidement, cette conviction Matrixienne va être remise en question. Les préceptes sur lesquels vous vous basez pour appréhender ce nouvel épisode prennent un coup d’humour dans la tronche et les nouvelles aventures, rebootées, de Néo peuvent petit à petit s’installer.
Un scénario entre séduction et ennui
Le moins que l’on puisse dire, c’est que la réalisatrice, Lana Wachowski a opté pour la carte de l’humour. Dès l’entame, son approche semble prendre de haut l’industrie des médias et moquer ce qu’est devenue notre société technologique. Ce parti pris est immédiatement déroutant. Artistiquement, il plonge le spectateur dans un questionnement très intéressant. De plus, la surprise, même si les plus futés liront rapidement entre les lignes, ouvre des portes sur la suite. Les 30 premières minutes promettent donc un spectacle audacieux et clivant.
Malheureusement, après cette introduction pleine de promesses, le scénario du film, le vrai va s’installer, comme dans le fauteuil de Morpheus. Il semblerait que ce ne soit que pour suivre la colonne vertébrale du premier Matrix. Quel paradoxe ! Comment peut-on lancer son film en se moquant de ce qu’on s’apprête à servir au public ? Alors, soit le but de Lana Wachowski est de créer un réel paradoxe dans son récit. Soit, l’époque des discours assumés des premiers Matrix est complétement révolue.
En gros, les évènements vont s’enchainer en s’articulant autour de conversations au sujet du premier Matrix, de retrouvailles à la limite du fan service avec d’anciennes gloires de la licence, et de nouveaux faits d’armes des sempiternels Neo + Trinity. En gros, on prend quelques anciens, on rajeunit le reste de la troupe, et on explique tout aux petits jeunes. Tout le reste repose sur des scènes de combats similaires à celles d’il y a 20 ans, avec les moyens d’aujourd’hui. C’est mal barré.
Des acteurs d’hier et d’aujourd’hui pour une résurrection ?
Le jeu des acteurs mérite qu’on s’y attache. Neo et Trinity ont vieilli. Ils ont perdu le charme des deux jeunes amoureux inconscients qui jouent au Beau au bois dormant dans la Matrice. Aujourd’hui, ils ont pris des rides et de la maturité. Le film tourne d’ailleurs terriblement autour des deux tourtereaux, trop à mon goût. Les autres ont un vrai potentiel. Le nouveau Morpheus, Yahya Abdul Mateen est excellent, mais il fait du Morpheus. Or, Morpheus s’appelle Laurence Fishburne. Personnellement, je n’en ai pas encore fait le deuil. Jonathan Groff incarne l’agent Smith avec brio. Néanmoins, Smith s’appelle Hugo Weaving. Tout le monde ne peut pas débarquer et se prendre pour le Roi des Elfes de Tolkien.
Il nous reste donc la petite Bugs. Coincée entre ses mèches bleues, Bugs Bunny et le bug informatique, elle pourrait porter davantage le poids d’une potentielle résurrection. Malheureusement, son texte en a décidé autrement. Elle est alors condamnée à endosser le rôle d’une groupie douée. Les paillettes, c’est pour les grands ! Le casting de ce nouvel opus est un élément clé dans sa réussite. Malheureusement, les absents manquent terriblement. Et le film singe tellement le 1er, qu’il est difficile d’oublier les fantômes de ses vieilles gloires absentes.
Globalement, Matrix 4 vaut-il le coup ?
Matrix 4 a relancé la licence. La trilogie initiale avait cerné les enjeux du concept de la Matrice et de la puissance des machines. Elle avait aussi fait le point sur les capacités de Néo à contrarier leurs plans. En relançant sa poule aux œufs d’or, la Warner a pris le risque de la salir, avec un épisode inutile. En tant que fan de la première heure, j’ai trouvé cet appendice ennuyant. Le spectacle repose sur les codes d’aujourd’hui, avec un concept qui a fait le succès d’une technologie à l’aube de sa révolution en 1999.
Dans ce Matrix, il y a de quoi parler aux plus jeunes. Le film propose même une scène inspirée des films de zombies ou autres COD Mode Zombies. Néanmoins, j’ai du mal à imaginer la nouvelle génération se plonger dans cette mythologie faite d’extraits de Matrix 1 et de notions qui ont fait leur temps.
Concernant le public éclairé et fan de la licence, cette boucle scénaristique tourne plus en rond que jamais. Même si remettre une couche de Néo et Trinity peut combler une minorité en manque de pilules rouges, le risque servir un plat très très tiède aux autres est réel. Finalement, la résurrection de Neo et Trinity n’a pas trouvé de nouveau but. Si ce n’est le même que celui qu’ils avaient déjà atteint à la fermeture de Matrix 3.
Conclusion – Matrix 4 ou Matrix de trop ?
Avec une trilogie bouclée comme Matrix, la résurrection s’annonçait complexe, mais ambitieuse. Avec Matrix 4, le paradoxe d’un cahier des charges qui veut contenter tout le monde sans rien inventer culmine au sommet de son absurdité. Le film veut pavaner en s’affichant sur un ton humoristique, mais se perd dans le calque de son ainé. Quand il décide de donner un coup de fraicheur à ses meilleures scènes, il se contente d’un coup de peinture à l’huile, sans même prendre la peine de vérifier si la surface est encore solide. Dommage, mais pour moi, ce Matrix 4 s’est fait manger par sa Matrice d’un autre temps.
À bientôt pour palabrer autour de la chose cinématographique ou d’autres,
Vega
Hey,
Moi j’ai bien aimé aussi ce film, je viens d’enchaîner les 4
Gwen
Hey Gwen, c’est cool que tu aies apprécié le film :) J’ai aussi lu que tu t’étonnais des retours massivement négatifs… pourtant, la différence d’ambition “philosophico-matrixienne” entre cet épisode et la trilogie semble évidente. Du coup, je suppose que ce sont les attentes que l’on peut avoir envers ce genre de reboot qui vont stimuler nos impressions.
Franchement, toi qui as aimé l’œuvre, qu’as-tu aimé dans cet épisode ? Animatrix apportait 10 fois plus de panache à la tétralogie. Pour moi, c’est du Twilight version Matrix. Scénario pompé sur le 1er, des acteurs presque trop jeunes, sans la carrure de leurs prédécesseurs. Neo et Trinity mis en avant comme deux vieux, flashbacks incessants avec le subterfuge des images des épisodes précédents. Sans parler de la scène ridicule bots/zombie, juste là pour flatter les ados de la génération Walking Dead.
Finalement, je me souviens de ce que tu reprochais à Deathloop par rapport à Bioshock, dans le monde du jeu vidéo, et j’ai le même sentiment que toi, mais pour ce Matrix 4.
Néanmoins, bien vivre un film et en sortir satisfait, ça reste tellement subjectif, et la beauté étant dans l’oeil de celui qui la contemple, je t’envie car j’aurais aimé passer un bon moment au cinoche…
Enfin, dès lors que le film divise, c’est selon moi un gros critère de réussite, et je lui rendrai sa chance dans un an, après digestion de ma frustration LOL.
Salut Mike,
Moi j’ai regardé les 4 épisodes d’affilé et j’ai trouvé que ce 4ᵉ était le moins bon des 4 mais que ça reste largement au dessus des navets qu’on nous sert continuellement; principalement les suites/reboots (ghostbuster/jurrasic World…)
J’ai adoré la colorimétrie, l’ambiance sonore (particulièrement la scène avec Jefferson Airplane – White Rabbit qui colle tellement bien à la série) et l’habillage visuel, le fait que les personnages marchent sur les murs, le plafond comme si c’était “normal”, j’ai vraiment apprécié la trame romanesque entre Neo et Trinity qui était déjà pour moi un élément important.
J’ai moins aimé les revivals du premier, les nombreux extraits, la partie “on bash hollywood” que je trouvais sans interet et j’ai vraiment eu peur de l’intro qui me semblait recontextualiser bizarrement une suite. Le Mérovingien aussi ça méritait mieux
Pour les bonnes surprises, je trouve que le neo-morpheus est vraiment bien, le neo agent smith également,même si c’est dur de faire le deuil des précédents acteurs .
“The Analyst” est un excellent nouveau rôle, tout comme la jeune femme qu’on voit un peu trop timidement.
ATTENTION SPOILER :
Puis la fin, le fait que Trinity devienne “the one” également, j’ai trouvé ça sympa également; tout comme le fait que son antagoniste se joigne à lui dans son combat et que les humains cohabitent pacifiquement avec les machines.
La scène de zombie/course moto, j’ai vibré devant perso j’ai trouvé ça du même acabit que l’extraction de morphéus dans le premier même si la c’est sur qu’on avait un énorme effet de surprise en plus. C’était quand même vachement impressionnant
Dans l’ensemble le film ne m’a pas semblé raté/mal monté/incohérent , c’était fluide et maitrisé et si Neo a l’air fatigué : je pense que ‘c’est juste un souhait de la réalisatrice et au début du film on est tout autant déboussolé que lui.
Enfin voilà, ce n’est pas un super matrix si on veut mais quand je vois les gens parler de bouses de la décennie, il faudrait un peu jauger quand même.
J’en ai vu qui critiquait la nouvelle ville comme “bidon” en rapport à Zion qui était vraiment dingue, mais j’ai revu le 3 juste avant et je pense que les gens fantasment un peu leurs souvenirs aussi.
Excellente analyse, merci Gwen ! Je lui laisserai une 2e chance, en espérant que j’ai été trop gourmand dans mes attentes… c’est possible LOL.. Même si je tente toujours de rester objectif face à ce genre d’échéance.
Je me demande si une suite va débarquer… un article sur Numérama disait que ce Matrix est le cheval de Troie de la série. Selon eux, c’est un coup de maître de la réalisatrice qui a, avec brio, utiliser les défauts de l’industrie “cinéma/internet/…” d’aujourd’hui, pour en faire une caricature. Je n’adhère pas du tout à cette façon de légitimiser les défauts d’une œuvre. Par contre, ton analyse, pleine de ressenti et de partis pris, est pleine de bon sens :)
Enfin, concernant the Analyst, je te rejoins totalement, il est vraiment intéressant et sa double casquette est pleine de potentiel…
To be continued…
J’ai bien aimé ce matrix, mais pas suffisamment pour qu’il puisse atteindre le statut culte de la trilogie originelle. J’ai bien aimé les tas de clins d’œils aux autres matrix, les pointes d’humour, il y a pas mal de choses a lire entre les lignes mais ce n’est pas aussi percutant que ce qu’on attend d’un matrix. Si ca fait plaisir de revoir Keanu Reeves et Carrie-Anne Moss reprendre leurs rôles , l’absence de Laurence Fishburne en tant que Morpheus, et surtout l’irremplaçable Hugo Weaving en Smith font beaucoup de mal a ce 4eme épisode. A ce niveau, peut-être aurait-il été plus judicieux de repartir avec une nouvelle génération, nouveau élu… On sort de la salle avec un sentiment que ce matrix ne va pas au bout des choses, autant par les moyens (humains, techniques et certainement financier ) que par la réalisation. Ça reste un film divertissant et qui fera sourire ceux qui ont vu la trilogie, pas un mauvais film, loin de la, juste pas un très bon matrix. Il vaut tout de même le coup d’être vu ! A voir quelle suite sera donné a ce “reboot”…
Hey merci Pouki ! Je suis assez d’accord avec ton retour, et le sentiment de “cul entre deux chaises” de cet appendice. C’est vrai que les clins d’œil sont sympas, mais en termes de subtilité, on repassera… enfin, à mes yeux. :) Sinon, vous êtes finalement assez nombreux à avoir trouvé l’ensemble cool et plutôt divertissant, c’est tant mieux. Pour ma part, je me suis ennuyé, seuls les clins d’oeil m’ont fait sourire, ça fait peu évidemment pour un film de 2h30. Encore merci pour ton retour explicite !
Hé bien, cette critique semble correspondre à ce que je craignais depuis que j’ai entendu que Matrix allait faire son retour…
Je ne comprends pas vraiment la raison de ce retour surtout en changeant la moitié du casting original.
Les nouveaux acteurs, ça peut se comprendre vu que techniquement (si j’ai bien compris le scénario du 3) seul Neo et Trinity sont sorti “vivant” de la matrice sans devoir être complétement rebooté vu la décision de Neo face à l’architecte et de se faire assimiler par les machines.
Salut Mike et merci pour ton commentaire :) Il est vrai que ce qu’offre ce Matrix résume ce qu’on aurait pu craindre. Perso, je suis parti en mode enthousiaste, bon public en me disant “allez, je vais juste profiter, et si c’est bof, tant pis, c’est cool quand même”. Et finalement, je me suis ennuyé. Concernant les persos qui disparaissent avant le reboot, ce n’est pas si clair. Morpheus revient bien dans ce 4, en plus jeune… le scénario de Matrix est tellement capilotracté qu’ils auraient même pu faire revenir Elvis Presley, ça aurait été crédible LOL. Enfin, après, il faut le voir, car certains vont crier au génie, peut-être à raison. Pour ma part, les impénétrables voix du Seigneur Matrix ne m’ont définitivement pas pénétré je pense ! Amen ! Ahaha !